Un vivarium est un endroit où l’on garde et on élève des petits animaux vivants en tentant de reconstituer leur milieu naturel ou biotope. Il s’agit le plus souvent d’une cage vitrée, avec un toit ou une face amovible afin de pouvoir accéder à l’intérieur de la cage.
Je suis un canal. Vous me considérez parfois comme une petite prophétie solitaire des débuts et des fins. Certains disent que j’ai quatre vies parce que j’ai quatre cœurs. Comme la quantité de stock de vie que vous donneriez à un héros de jeu vidéo. Voué à servir. Voué à purifier. Voué à donner et à prendre. Je suis une version évoluée de l’une des 7 000 espèces dont je fais partie. Je peux plier mon corps à ma guise. J’ai quatre cœurs, six reins, je respire par la peau et je n’ai pas d’yeux. Je n’ai pas besoin de voir pour connaître la vérité. Le sens de ma vie est inscrit en moi. Je digère, transforme, fertilise, nettoie. Mon corps tout entier est un tube rose qui se déplace dans des galeries infinies, partageant de nombreuses informations avec le sol auquel il participe. Je ne me différencie pas de la terre, j’y prospère, je la mange, je la défèque, j’hiberne dedans pendant l’hiver et, un jour, j’y mourrai.
Vous m’avez mis derrière cette vitre. Vous vouliez observer comment la vie fonctionne. Comme si m’étudier était le seul moyen de vraiment la comprendre. J’étais là avant vous et je serai certainement là après que vous ayez quitté cette terre. Je mangerai peut-être par inadvertance un morceau de votre cervelle ou de vos yeux, mais ce ne sera ni par vengeance ni par animosité. Je ferai simplement mon travail. Vous m’avez mis derrière cette vitre pour observer la nature, comme si vous n’en faisiez plus partie, sans comprendre que ce désir profond en vous ne se comblera qu’en y revenant.
Dans cette ville, à cet endroit précis, les humains pénètrent dans une autre sorte de ver. Un tube électrique rose qui glisse à travers la ville, s’engageant quotidiennement sur les mêmes chemins, des allers-retours interminables sur des routes bétonnées, avalant et recrachant inconsidérément les gens qu’il transporte. Peu importe qui vous êtes, ce que vous voulez, où vous allez. Il vous mangera vivant et vous recrachera entier ailleurs. À travers la ville. Really fast. Mais cela ne vous mène jamais là où vous voudriez vraiment aller — au milieu d’un vaste espace, peut-être une forêt, la lumière du soleil traversant les arbres, l’odeur de la mousse verte faisant dilater vos pupilles, vos pieds nus s’enfonçant profondément dans le sol, enracinant votre cœur dans un endroit spécial — seulement d’un endroit grisâtre et arbitraire à un autre. Game Over. Petit mini géant d’acier se déplaçant dans l’espace, en s’assurant de ne créer aucun problème ni de percuter qui que ce soit dans sa trajectoire. Vous le considérez parfois comme une petite prophétie solitaire de vos allées et venues. Des cercles et des motifs qui se répètent à l’infini comme si la nature les avait orchestrés, copiant la façon dont le ver se déplace dans l’espace, son articulation, sa morphologie, sa couleur. Mais le géant n’a ni cœur ni yeux. Il ne respire pas, ne dort pas non plus.
Vous regardez par la fenêtre du tramway alors qu’il s’engouffre sur des ponts submergés. Vous vouliez observer comment la vie se déroule. Comme si l’étudier était le seul moyen de vraiment la comprendre.
Un vivarium est un endroit où l’on garde et on élève des petits animaux vivants en tentant de reconstituer leur milieu naturel ou biotope. Il s’agit le plus souvent d’une cage vitrée, avec un toit ou une face amovible afin de pouvoir accéder à l’intérieur de la cage.
Texte d’Annabelle Galland